vendredi 21 mars 2014

La vérité, les autochtones et les pédophiles

Je voudrais revenir sur le petit débat qui s'est tenu en cours mercredi dernier (19/03/2014).
Pour vous remettre en contexte, le cours portait sur la vérité et la réalité, les problèmes, les questions et les nuances que cela soulève et porte le titre suivant: "La fin et les moyens, la vérité et le mensonge".
Il a été question, à titre d'exemple, du cas de la surpopulation autochtone en prison, notamment pour des infractions ou délits mineurs comme par exemple un ticket pour excès de vitesse. A la question "Pourquoi un tel déséquilibre?", plusieurs réponses ont été données dont deux principales, basées sur des recherches en sciences sociales :
*Les Autochtones sont victimes d'un système judiciaire qu'ils ne maîtrisent pas (l'argument de différence de culture)
*Le système des réserves ostracise les autochtones. (l'argument de l'isolement)

Ce qu'il en ressort, c'est que le système de justice créait lui-même une injustice, vis-à-vis d'une partie minoritaire de la population. Face à cela, ont été posés les arguments d'égalité: "Tout le monde doit payer son ticket lorsqu'il fait un excès de vitesse, c'est normal", "Nul ne peut ignorer la loi".
La controverse: "Si tu ne maîtrises pas la langue dans laquelle est rédigée la contravention?", "Si tu ne connais pas les tenants et les aboutissants du système auquel tu es censé obéir, parce que nul ne te l'a appris?".

Ainsi, l'idée d'aménagement spécifique aux Autochtones, d'exception est proposée. Mais ce n'est pas équitable, ce n'est pas juste par rapport au reste de la population.
C'est à ce moment que je décide de venir mettre mon grain de sable dans l'engrenage: et si, dès le départ ça n'est pas juste et c'est mensonger: les Autochtones se sont fait imposer un système de lois qu'ils ne reconnaissent pas forcément, qui n'est (certainement) pas le leur.
, c'est le drame: "Ben voyons donc! Nous aussi Québécois on s'est fait imposer des lois qui ne sont pas les nôtres, des textes qui n'ont rien à voir avec notre culture! C'est trop facile de dire "Je ne me sens pas concerné alors je n'obéis pas". Si on pense comme ça, les pédophiles pourraient tout aussi bien considérer
qu'il ne reconnaissent pas la Loi et que cela bride leur désir sexuel pour les enfants"

Boum. En une seule réplique, les Autochtones, les Québécois et les pédophiles se retrouvent au même niveau: celui de nation, de peuple, de communauté qui revendique son identité.
Mais le problème, c'est que si c'est parfaitement légitime pour les deux premiers, ça ne l'est en aucun cas pour les derniers.
Je m'explique: au même titre que les Québécois, les Autochtones peuvent dénoncer les abus dont ils ont été les victimes, les décisions prises d'autorité et sans réelles concertations pour trouver un équilibre entre les nations. Et, de fait, ils peuvent revendiquer l'indépendance. Non, ce n'est pas un gros mot et en ce qui concerne les francophones c'est tout à fait envisageable dans la mesure où les dirigeants de l'époque n'ont pas signé la Constitution Canadienne, marquant là l'idée qu'il ne reconnaissait pas les préceptes directeurs imposés par les anglophones.
Mais bref, tout cela pour en arriver à un amalgame terrible et l'idée que les Lois ne peuvent être remises en question (et qu'elles sont justes dans l'absolu).
He bien, je pense que non, justement! Les lois, ce sont des balises, des consensus qui sont (fort heureusement) soumis aux évolutions, tout comme les populations qui s'y plient. Sinon, la France serait encore à l'heure actuelle sous le règne des Bourbons. L’apparente lenteur du processus pour les faire changer ne les rend pas immuables.

« Les tribunaux doivent prendre connaissance d’office de questions telles que l’histoire de la colonisation, des déplacements de populations et des pensionnats et la façon dont ces événements se traduisent encore aujourd’hui chez les peuples autochtones par un faible niveau de scolarisation, des revenus peu élevés, un taux de chômage important, des abus graves d’alcool ou d’autres drogues, un taux élevé de suicide et, bien entendu, un taux élevé d’incarcération » (juge LeBel, s’exprimant au nom de la majorité dans R. c. Ipeelee, 2012)
Gouvernement du Canada, 2013. "Délinquants autochtones, une situation critique". Document d'information. [en ligne] http://www.oci-bec.gc.ca/cnt/rpt/oth-aut/oth-aut20121022info-fra.aspx 

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