lundi 2 décembre 2013

Un champion déchu

 
Cette fin de semaine a eu lieu un gala de boxe à Québec, le clou du spectacle était le combat entre Adonis Stevenson et Tony Bellew. Comme tout combat de championnat, on nous en a parlé des semaines en avance, avec chaque jour de nouveaux détails à dévoiler, la préparation de chacun, des déclarations chocs, les entraînements publics, les entrevues, les points de presse, la pesée officielle, la conférence de presse, etc. Bref, tout pour mousser l’événement, lui faire prendre de l’ampleur, avec comme point culminant à la rivalité : le combat !
Sauf que la semaine dernière, Adonis Stevenson se serait bien passé de faire parler de lui pour ces raisons. En effet, des révélations chocs sont venus perturber le déroulement habituel des choses. Un journaliste a dévoilé une partie du passé du boxeur qu’il aurait préféré taire, surtout pas présenté comme cela. Si certains savaient que le champion avait déjà fait de la prison, pratiquement personne ne connaissait l’histoire de façon aussi détaillée. Pour en faire un petit résumé, au début de la vingtaine, Adonis faisait partie d’un gang de rue, avec tout ce que ça implique en termes de drogue, prostitution et violence. Il a fait de la prison après que l’une de ses victimes l’a dénoncé, lui et ses complices, pour l’avoir détenue contre son gré, obligée à se prostituer et battue violemment.
Bien sûr que ce n’est pas agréable de voir une telle histoire surgir dans les médias tout juste avant un important combat, surtout lorsque cette histoire est vraie.
Bien sûr que l’on peut considérer que tout cela est du passé, qu’il a changé, qu’il a fait face à la justice, qu’il peut passer à autre chose et refaire sa vie.
Mais il y a bien une chose avec laquelle je ne suis pas du tout d’accord, c’est lorsqu’il se lamente qu’il est victime de racisme. Comme si on se plaisait à le traîner dans la boue parce qu’il est noir ! La couleur de sa peau ne change rien aux faits, à ce qu’il a fait. La couleur de sa peau ne change rien non plus au fait qu’il est maintenant un personnage public, les millions et la gloire viennent avec certains désavantages, comme celui d’être scruté à la loupe.
Peu importe quel champion de boxe aurait eu le même passé, peu importe la couleur de sa peau, il n’aurait pas échappé à l’opinion publique. Le journaliste ne fait que rapporter les faits, il n’invente rien à l’histoire.
C’est vrai que ça ne tombe pas bien pour lui, mais s’il avait fait preuve de transparence et d’honnêteté, et aussi d’un peu de jugement, il aurait dévoilé son passé bien avant.
S’il l’avait fait par lui-même, il aurait pu choisir le moment qui faisait son affaire, il aurait pu l’aborder à sa façon, il aurait pu choisir le média. Bref, il aurait eu le contrôle sur le tout. Bien préparé, il aurait même pu s’en sortir grandi, comme un parfait exemple de réhabilitation sociale. Il aurait pu appuyer des organismes venant en aide aux membres des gangs de rue ou bien contre la violence faite aux femmes. Son histoire aurait pu en inspirer d’autres, il aurait fait un porte-parole idéal à certaines de ces causes.
Mais plutôt que de prendre les devants, il s’est réfugié dans le déni. Même lorsque l’histoire est sortie, plutôt que de faire face à la réalité et d’offrir ses excuses, il s’est déclaré victime de salissage, de discrimination, de racisme et parle même de s’exiler à l’étranger.
Ce n’est pas l’attitude d’un vrai champion.

http://www.lapresse.ca/le-soleil/sports/boxe/201312/01/01-4716543-adonis-stevenson-se-dit-victime-de-racisme-de-la-part-des-medias.php

2 commentaires:

Anne-Frédérique Grenier a dit…

Je suis d'accord avec ton point de vue. Il est vrai que Stevenson aurait pu dévoiler son passé par lui-même et l'utiliser plus positivement que ce que les médias en ont fait. C'est bien connu, les journalistes cherchent des histoires qui vont faire réagir, qui ne sont pas banales, bref ils cherchent le sensationnalisme. De son côté, Stevenson aurait pu en parler et montrer que c'est du passé, que le sport l'a en quelque sorte sauvé. Mais en même temps, je comprends son choix d'avoir décidé de garder tout ça pour soi. Lorsqu'on est dans le sport professionnel, le succès arrive après de longs et durs efforts. Tout cela arrive parfois très vite et Stevenson n'avait peut-être pas envisagé que cette histoire sortirait contre son gré, surtout tout juste avant un combat important. J’ai beaucoup de misère avec ce non-respect de la vie privée des personnalités connues. Je ne crois vraiment pas que nous sommes obligés de tout savoir sur la vie des gens, surtout lorsque l’information peut leur faire du tort. Il est vrai que ces actes, il doit les assumer, mais je suis certaine qu’il a été encadré pour le faire et que de tout détailler sur ce passé douteux est vraiment d’intérêt public.

Olivier T. a dit…

Effectivement, comme racontait son entraîneur Yvon Michel après le combat, ils ont tenté de rester zen dans toute cette histoire tout au long de sa semaine de préparation. Il est monté dans le ring, malgré toutes ces distractions, ce qui ne crée pas la meilleur préparation possible. On peut dire que s’il y a bien un sport qui peut te coûter la vie si tu n’es pas bien préparé, c’est bien la boxe. C’est très dangereux pour un boxeur de vivre une telle situation puisque sa sécurité est en jeu. Un boxeur met sa vie en danger à chaque combat. On peut comprendre que son passé criminel ne donne pas l’exemple aux jeunes de notre société, mais sa réhabilitation montre que les gens peuvent changer et faire quelque chose de bien. «C’est le premier Noir issu des gangs de rue qui effectue une réhabilitation avec succès. À chaque combat, Adonis se bat pour le Québec, et il a l’impression qu’on le laisse tomber » souligne son entraîneur Yvon Michel.