mardi 27 novembre 2012

Sandy : une injustice médiatique?

Huffington Post : Cuba ravagé par Sandy
Évidemment, tout le monde a entendu parlé de l'ouragan Sandy qui a ravagé une partie des États-Unis il y a environ un mois. Pendant des jours, voire des semaines, à la radio, à la télévision, sur le Web, on ne parlait que de ça. Les médias nous ont montré à profusion les dégâts que la tempête avait causé, principalement à New York.

Cependant, plusieurs groupes, autorités et des milliers d'individus se sont plaints sur le manque de couverture médiatique qu'a souffert d'autres pays, notamment Cuba, Haïti et les Caraïbes.  Sur le site d'AlterPresse, un réseau alternatif haïtien d'information, on peut notamment lire ceci « La couverture médiatique du passage de l’ouragan Sandy, la semaine dernière, dans les Caraïbes et la côte nord-est des États-Unis d’Amérique, a laissé un goût amer, ponctué par le mécontentement, l’indignation et une mise en question du rôle des médias, selon les informations rassemblées par l’agence en ligne AlterPresse. » (Edson Louidor ; 2012, en ligne) Par exemple, le correspondant de Racio National pour l'Amérique Latine déplore qu'en quelques jours, plus de 300 000 photos ont été publiées dans les médias concernant les ravages de Sandy sur New York alors qu'il était très difficile d'en trouver pour Haïti.

Malheureusement, cette situation a engendré une grande perte de confiance envers les industries médiatiques chez plusieurs personnes de ces régions du monde. Comme certains le mentionnaient sur les réseaux sociaux : la douleur n'a pas de drapeaux. Cela entraîne d'importantes questions sur le plan éthique. On peut se demander si la décision de couvrir davantage telle zone va au-delà du contexte strictement informatif. Des aspects politiques, économiques sont-ils en jeu? L'article soulève trois questions plutôt intéressantes

«Qu’est-ce qui fait pencher la balance de la couverture médiatique d’un côté, plutôt que de l’autre ? »

« La différence entre pays riches et pays pauvres ? La différence entre centres de pouvoir et périphéries ? »

« Jusqu’à quand le droit universel à l’information, proclamé par la déclaration universelle des droits humains de 1948, et la démocratisation de la communication se concrétiseront-ils dans le monde ? »

De mon côté, sans vouloir sous-estimer la souffrance vécue par des milliers d'Américains, je pense que ce phénomène est loin d'être récent. On n'a qu'a penser à toute la couverture médiatique qu'a eu l'attentat contre le World Trade Center alors qu'on ne parle presque plus des atrocités qui se passent tous les jours dans les pays du Moyen-Orient. Je comprends toutefois que les gens soient plus touchés par des catastrophes qui arrivent près d'eux. Moi-même, la première, je suis sûre que je serais plus bouleversée d'apprendre qu'il y a eu une tragédie à Québec qu'à Madagascar, je crois que c'est dans la nature humaine. Cependant, comme le mentionne un article de Le Plus, les entreprises médiatiques nous font nous questionner de plus en plus si les nouvelles qu'elles traitent ne sont pas directement liées à leur potentiel traitement sensationnaliste et au profit qu'elles génèrent ... (B ; 2012, en ligne)

Source

- B. Dominique. 2012 « Sandy frappe Haïti et New York : le 2 poids 2 mesure du traitement médiatique ». Le Plus. En ligne. URL : http://leplus.nouvelobs.com/contribution/676358-sandy-frappe-haiti-et-new-york-le-2-poids-2-mesures-du-traitement-mediatique.html. Consulté le 26 novembre 2012.

- Edson Louidor, Wooldy. 2012 « Haïti-Caraïbes-USA-Sandy : L'indignation médiatique ». AlterPresse. En ligne. URL : http://www.alterpresse.org/spip.php?article13642. Consulté le 26 novembre 2012

3 commentaires:

Nicolas Otis a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Nicolas Otis a dit…

C'est bien connu que les Américains ont une forte tendance à aimer se regarder le nombril. Ce n'est pas tellement mieux de notre côté de la frontière. Dans un bulletin d'une heure, les nouvelles internationales occupent généralement entre 30 secondes et 2 minutes. Je crois avoir une explication à ce phénomène, les gens se foutent éperdument de ce qui se passe à l'étranger. Ils préfèrent entendre parler d'un homme de 70 ans qui croit habiter dans une maison hantée que d'un génocide dans un pays du tiers monde.
Il faut arrêter de croire que les chaines de nouvelles travaillent pour la population, ce temps est révolu, ils agissent dorénavant pour le porte-feuille du propriétaire. Si la nouvelle n'a pas assez de potentiel de revenus, on l'envoie directement à la poubelle. C'est entre autres pourquoi en pleine campagne électorale, le Journal du Québec a eu le culot d'écrire: «UN PÉDOPHILE AU SALON DE QUILLES» comme gros titre de sa une... Comme s’il n'y avait rien de plus pertinent à mettre en première page! Pertinent? Non. Vendeur? Oui... Je commence à croire que l'information est un cycle et qu'on est maintenant revenu au «Yellow Journalism» des années 70!

Unknown a dit…

Bonjour Annie. Ton article soulève des questionnements intéressants et qui devraient nous tracasser chaque jour compte tenu de notre domaine d’étude. Le rôle des médias dans la couverture médiatique m’interpelle tout particulièrement et me rappelle la séance d’un de mes cours…

Dans le cadre du cours Communication, information et vie politique, nous avons abordé la notion de la sélection de l’information dans l’univers du journalisme. Pour ceux qui ne le connaissent pas, le modèle de Galtung et de Ruge permet de mettre le doigt sur les différentes caractéristiques qui militent en faveur de la sélection d’un événement. Ainsi, nous avons vu que les événements possèdent une valeur ou un intérêt propre, qui vont en faciliter sa transformation en nouvelle. (Giasson, 2012) Dans ton exemple (l’ouragan Sandy), il s’agit bel et bien d’un seul événement, mais qui aura des répercussions sur différents territoires. Pourtant, dans les médias, on traite surtout des ravages causés par l’ouragan aux États-Unis (New-York entre autres). Selon les deux auteurs que j’ai nommés précédemment, une des caractéristiques qui favorisera qu’un événement soit plus traité sur un territoire donné, c’est en fait une question de « proximité culturelle » de celui-ci avec les membres de l’auditoire auquel la nouvelle est destinée. (Giasson, 2012) Ainsi, la couverture médiatique d’un événement a une signification, une résonance culturelle pour l’auditoire auquel les médias s’adressent et ils le savent très bien! Il n’est donc pas étonnant que les entreprises médiatiques privilégient des informations locales ou régionales aux dépens de d’autres qui auraient un plus grand «intérêt» à être traitées, mais qu’il ne le sont pas alors que la distance entre le public et l’événement est plus grande. Les instances médiatiques ont compris une chose : l’événement doit avoir une signification pour le public qui va consommer la nouvelle. Ainsi et comme tu le mentionnais Annie, en te référent à un questionnement émis dans un article publié dans Le Plus, les événements sont nécessairement directement liés au profit qu’elles génèrent!

Bref, le choix d’offrir une plus grande couverture ou tout simplement « une couverture » à un événement plutôt qu’à un autre découle d’un grand processus de sélection de l’information. Je ne vous apprends rien en vous disant que l’information dans les médias est une construction de la réalité et non pas « la » réalité. Celle-ci est liée à des enjeux économiques, idéologiques et bien sûr, politiques. La sélection est effectuée par les « gardes-barrières », mieux connus sous le nom de « gate-keepers » de l’information. (Giasson, 2012) Ceux-ci vont donc filtrer l’information et ancrer l’histoire qui nous est présentée dans les bulletins de nouvelles. N’oublions pas que dans le processus de sélection de l’information, l’entreprise médiatique va aussi nous en faire « sa » propre lecture de l’événement.

Évidemment, on s’éloigne du rôle premier du journalisme!

Bibliographie :
Giasson, Thierry. 2012. « notes de cours 10 - séance du 14 novembre ». Communication, information et vie politique. (Consulté le 27 novembre 2012).