jeudi 3 octobre 2013

Légalisation de la marijuana


Le billet « Pourquoi pas légaliser la prostitution » publié ci-bas par Frédérick Breton-Labbé m’a interpelé, et m’a fait penser en plusieurs points au débat actuel sur la légalisation de la marijuana. Plutôt que de commenter l’article de mon collègue, j’ai décidé d’écrire un nouveau billet, me permettant d’avoir vos réactions.

Ce débat dure depuis plusieurs années, mais c’est le chef du Parti libéral du Canada, Justin Trudeau, qui a récemment ramené le tout sur la table[1]. Suite au petit scandale qui a éclaté après que le fils de PET ait annoncé qu’il avait fumé du pot à quelques reprises, le chef du PLC a annoncé qu’il allait faire de la légalisation de la marijuana un élément de sa plateforme électorale. Je ne suis pas un fan du jeune Trudeau, mais je dois avouer que cette déclaration m’a plu. L’histoire le démontre : la prohibition ne règle rien ! La marijuana est actuellement dans la même situation que l’était l’alcool au temps de la prohibition, au début du XXe siècle.

Il faut arrêter de voir les militants prolégalisation comme des « poteux voulant consommer leurs herbes favorites légalement » et regarder les arguments en face. En légalisant la marijuana, le gouvernement canadien pourrait contrôler les ventes. De plus, ce ne serait plus le crime organisé qui s’occuperait de la vente du pot. Les consommateurs modérés qui achètent du cannabis pour passer un beau vendredi soir (au même titre que ceux qui boivent un coup) doivent marchander avec le crime organisé. Ces transactions sont risquées et avec toutes les autres drogues vendues par ces pushers, le risque de tomber sur de la marijuana mélangée avec des cochonneries augmente. En encadrant la vente du pot, le gouvernement s’assurerait de la propreté du produit et plus jamais, on entendrait des éternels hippies dire : « Dans mon temps, le pot était clean ! C’est pas comme aujourd’hui ».

Actuellement, les jeunes ont trop accès facilement à la marijuana. En la contrôlant, le gouvernement pourra éliminer cet accès. Un autre problème par rapport aux jeunes est la revente. On entend trop souvent des histoires d’adolescents de 14-15 ans qui se font battre par des membres du crime organisé. Ces jeunes, voulant faire un peu d’argent, en viennent à acheter de la marijuana et la revendre. Ceux-ci passent par dessus la hiérarchie établie et mettent en colère les bandits qui gèrent le secteur.
Le marché noir est un milieu dangereux où seules les drogues dures devraient être vendues. La prohibition du pot « menace la sécurité de l'individu en le confinant aux réseaux criminels pour son approvisionnement en cannabis[2] ». Un produit relativement inoffensif comme la marijuana ne devrait pas être vendu aux côtés de la cocaïne, le speed et l’héroïne.

Un autre argument en faveur de la légalisation de la marijuana est la confiance envers les citoyens de notre pays. La marijuana n’est pas plus néfaste que l’alcool et pourtant, cette dernière est redevenue légale au Canada depuis 1948. En établissant des règles strictes de consommation comme la tolérance zéro avant la conduite d’un véhicule, on éviterait les dérapes. Si le gouvernement fait confiance aux adultes quant à leur consommation d’alcool, pourquoi ne le ferait-il pas pour la consommation de marijuana ?

D’un point de vue économique, Justin Trudeau a rappelé que le gouvernement canadien « dépense presque 500 millions de dollars par année pour poursuivre la criminalisation de la marijuana ». Ces dépenses sont inutiles ! De plus, en légalisant le pot, le gouvernement pourrait percevoir des taxes sur les ventes.

Dans un éventuel cas de légalisation de la marijuana, les règles devraient cependant être strictes. Aux États-Unis, les états de Washington et du Colorado ont voté en faveur de la légalisation en 2012. Les deux référendums vainqueurs ont « pour effet de légaliser la consommation et la possession de jusqu'à 28 g de cannabis pour les personnes de 21 ans[3] ». De plus, la production et la vente seront supervisées par les autorités locales et les revenus seront réinvestis dans des projets publics comme la construction d'écoles. C’est la preuve qu’il y a bel et bien un moyen de légaliser la marijuana en toute sécurité.

Au-delà de tous ces arguments prolégalisation, il est bien de rappeler que fumer est nocif, peu importe l’herbe roulée dans le papier ! Avec toutes les publicités contre la cigarette, les consommateurs sont tous avertis. Le gouvernement doit laisser ses citoyens faire ses propres choix, tout en encadrant la vente de produits nocifs pour la santé comme la cigarette, l’alcool, la marijuana et le PFK !


[2] http://blocpot.qc.ca/programme/4/avantages_legalisation
[3] http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-canadienne/201211/07/01-4591435-legalisation-de-la-marijuana-harper-refuse-demboiter-le-pas-.php

1 commentaire:

Unknown a dit…

Je suis en accord avec toi sur ce débat. La légalisation de la marijuana règlerait plusieurs problèmes comme le taux de criminalité et les coûts reliés à celui-ci, le contrôle de la vente et l'apport économique que cette décision amènerait à l'échelle nationale. Cependant, certains désavantages ne sont pas négligeables. Je me positionne ici en tant qu’avocat du diable.

D'abord, il faut faire le point sur la situation des jeunes dans le contexte de la légalisation du pot. Ayant tous déjà été "jeunes" et contraints à l'autorité, on sait très bien que quelque chose d'interdit stimule encore plus l'intérêt et le désir de contourner les règles. Si la légalisation du pot pourrait diminuer le taux de criminalité chez les jeunes et peut-être les "décourager" à employer cette substance - parce qu’il serait bien moins excitant de se procurer du pot en vente libre que de passer par des contacts pas très fiables et profiter de leur gain en cachette - elle pourrait cependant avoir l'effet inverse. En effet, lorsque quelque chose devient permis, l’engouement dure un temps, mais tend à s’essouffler rapidement. Dans le cas des jeunes qui consommeraient légalement de la marijuana, au bout de quelques temps, il faudra prévoir qu’ils veuillent aller voir ailleurs et se tourner vers d’autres substances. Par exemple, certains jeunes ne consommeront plus d’alcool sous prétexte qu’ils ont fait « le tour de la question ». De ce fait, ils se tourneront alors vers autre chose, comme le pot. Or, s’il est rendu légal, il faut prévoir que les jeunes optent de nouveau pour autre chose, c’est-à-dire des substances de plus en plus nocives et loin d’être légales. L’accès facile à la marijuana se transposera alors à d’autres drogues et le même questionnement se posera encore une fois.

Également, si le crime organisé contrôle autant de choses, c’est que ses dirigeants sont bien implantés et qu’ils ont plus d’un tour dans leur sac. Si le potentiel gouvernement Trudeau légalise la marijuana, il faut s’attendre à faire face à une crise. Les organisations oeuvrant dans le crime organisé et qui contrôlent actuellement en grande partie la vente de pot pourraient être mécontents de la situation. Dans cette éventualité, il faudra encore une fois prévoir méticuleusement les possibilités et même envisager certaines négociations pour éviter trop de débordements et de conflits.

Pour ce qui est de la confiance accordée aux citoyens dans leur consommation personnelle, je pense que le seuil est difficile à établir. Il est vrai que l’alcool est devenu légal et que des lois sont apparues avec le temps afin de favoriser sa règlementation, mais les écarts et les abus existent toujours. C’est vrai qu’il ne faut pas généraliser, mais il ne faut pas ignorer la situation non plus. Le meilleur exemple est la loi récemment établie concernant le seuil du taux d’alcool dans le sang pour les 21 ans et moins au volant. Après avoir légalisé cette substance, puis fixé le seuil à 0,08 % pour la conduite, les autorités ont finalement enlevé ce privilège aux moins de 22 ans en appliquant la « tolérance zéro ». On observe donc une régression et un repli par rapport à la loi. Si le même phénomène se reproduit avec la légalisation du pot, pourra-t-on vraiment affirmer que c’était finalement une bonne chose ? Oui, on évite certaines dérapes avec des lois, mais pas toutes. On donne aux gens un pied et ils en prennent quatre. Après la légalisation du pot, les gens voudront légaliser d’autres drogues et on revient à ce même scénario. Bref, toujours le même dilemme, sauf que les substances changent.

Bien sûr, les situations décrites demeurent des éventualités qui pourraient survenir, mais qui pourraient également prendre une tournure positive. En somme, la légalisation de la marijuana peut avoir des effets bénéfiques à plusieurs échelles, mais ce processus nécessite beaucoup de préparation et de gestion. Tout comme tu l’as si bien dit dans ton texte, cette substance devra être consommée avec modération malgré sa légalisation. Et le PFK aussi.