jeudi 7 octobre 2010

Une vidéo controversée


Ce matin dans le journal Le Soleil, Jean-François Néron a écrit un article qui m'a paru un bon exemple d'enjeu éthique. Pour mieux comprendre la situation, voici le lead de l'article:

«La mère d'un militaire mort en Afghanistan monte au front sur le Web pour demander le retrait immédiat d'une capsule de la Fédération des femmes du Québec (FFQ) diffusée sur YouTube qu'elle juge offensante pour les mères des militaires».

L'organisme FFQ a produit des capsules vidéo diffusées sur le Web qui fait la promotion de la Marche mondiale des femmes du 12 au 17 octobre. Une des capsules dénonce, d'une façon très maladroite, l'envoi de troupes en Afghanistan. On met en scène une mère qui a perdu son fils à la guerre, mais le message envoyé par cette publicité reste choquant. «Avoir su qu'en donnant la vie j'allais fournir de la chair à canon, je n'aurai peut-être pas eu d'enfant», cette phrase me semble très blessante à l'égard des mères, qui sont en deuil. Les familles des militaires morts au combat n'ont pas à subir le mécontentement des organismes antimilitaristes.

La FFQ aurait très bien pu s'attaquer directement au Premier Ministre Harper, au lieu de mettre en scène des propos blessants pour les gens qui ont perdu un être cher. Qu'on soit pour ou contre l'envoi de militaires en Afghanistan, pour ou contre le gouvernement conservateur ou pour ou contre les pratiques politiques de Harper, on ne peut pas diffuser des propos sans réfléchir à tous les impacts qu'ils auront. Les militants de la cause antimilitaristes auraient du réfléchir à la réaction qu'auraient les mères qui vivent la perte de leur enfant. Céline Lizotte, la mère d'un militaire mort au combat, a appris à vivre avec les opinions contraires aux siennes, mais des propos exprimés ainsi ne sont que blessant pour elle.

À mon avis, avant de diffuser des vidéos qui abordent des sujets controversés, on devrait toujours prendre un peu de recul. Dans le cas présent, les mères de militaires mort au combat n'ont pas à être utilisés pour défendre les propos d'un organisme antimilitaristes, peu importe leur opinion par rapport à cette cause. Certaines d'entre elles, ont peut-être beaucoup de peine et de colère vis-à-vis du gouvernement Harper, mais elles ne méritent pas qu'on traite leur enfant décédé de «chair à canon» et ne regrettent sûrement pas d'avoir eu un enfant qu'elles ont élevé et aimé.

3 commentaires:

Marie-Jo a dit…

Bonjour Audrey!

Je n'ai rien à ajouter mis à part le fait que je suis entièrement d'accord avec toi. Ton exemple est selon moi très pertinent, en plus d'être intéressant.

Je trouve aussi qu'avant de diffuser ou simplement de sélectionner un concept, il est essentiel d'avoir un regard extérieur, le plus neutre possible. Peut-être que la cause tient à coeur aux créateurs, mais il faut tout de même penser aux autres et se mettre à la place des gens qui pourraient être touchés par la publicité.

Ainsi, le bout de phrase «je n'aurai peut-être pas eu d'enfant» ne se retrouverait pas dans la capsule.

Est-ce que ça pourrait être éthique justement de demander l'avis de mères de militaires avant de créer la publicité(dans le cas de l'exemple donné)?

À noter que mon nom n'est aucunement en lien avec la «Céline Lizotte» de l'histoire. Je le mentionne question d'être transparente haha! ;)

Bon long week-end à tous!

MJ

Marion a dit…

Cet exemple très récent soulevé par mes collègues m'a immédiatement fait penser à un passage du livre Éthique et publicité de monsieur Claude Cossette.

Traitant de la formation technique de certaines écoles de publicité et de l'absence de réflexion critique qui les caractérise souvent, le passage est le suivant : '' On y enseigne les méthodes qui permettent d'arriver le plus efficacement possible aux fins recherchées, laissant entendre que le but visé légitime les moyens pris. '' (Cossette, 2009 : 18)

Dans cette perspective, je considère que ce concept à tout le moins dérangeant est un bon exemple du manque de réflexion critique qu'il est parfois possible de constater dans le domaine de la publicité.

Vous, futurs publicitaires, relationnistes et journalistes, considérez-vous que le but visé peut légitimer tous les moyens pris pour arriver à nos fins? Moi, je ne le crois pas.

Référence :
Cossette, Claude. 2009. Éthique et publicité. Québec : Les Presses du l'Université Laval, 146 pages.

Catherine Julien a dit…

À l'instar de vous toutes, je suis entièrement d'accord avec vos positions!

Dans de telles situations, je trouve qu'il est risqué, mais surtout dangereux, qu'une seule voix parle au nom de toutes les mères ayant perdu un enfant à la guerre, s'il ne s'agit pas du message que souhaite transmettre le reste des militants de l'organisme.

On retrouve ici le principe de cohérence dont parlait Mme Farinacci. Le message transmis par une organisation doit être en accord avec les valeurs que veulent transmettrent ses membres.