mercredi 10 novembre 2010

Vous faites-vous exploiter par votre coiffeuse?

Ce mardi, j’ai eu la chance d’assister au Speed dating organisé par la Société des communicateurs de Québec (SOCOM). Cette activité permettait aux étudiants de rencontrer une dizaine de professionnels œuvrant dans les domaines de la publicité, des relations publiques et du journalisme, ainsi que de se faire une idée des multiples possibilités d’emplois dans le monde des communications.

J’ai trouvé la soirée très intéressante et, surtout, extrêmement enrichissante. Cependant, une seule note négative m’a fait grincer des dents.

Connaissez-vous la nouvelle technique du
« undercover marketing »?

Selon Marc Vandercammen et Brigitte Bouton, la technique, aussi connue sous le nom de bouche-à-oreille, « vise à approcher le consommateur dans son environnement sans qu’il est conscience d’une démarche commerciale. Le marketing furtif va diffuser une information ou un message favorable à la marque ou à ses produits, sans que le message apparaisse comme venant de la marque ou de son agence. » (2006 : 96)

En d’autres mots, certaines agences engagent des comédiens qui, par exemple, se rendent dans un lieu public pour vanter les mérites d’un nouveau produit en tant que « citoyens ordinaires ». Sur fond de malversation, « they will pretend to be ordinary folk, as they persuade you, unawares, to buy their brand. » (Standley, 2001: en ligne)


J’avais déjà entendu parler de cette technique dans certains cours du programme, sans toutefois penser que le phénomène se produisait régulièrement. Encore pire, je ne croyais pas que le undercover marketing était utilisé ici même, à Québec. C’est ce que j’ai appris en discutant avec l’un des publicitaires présents au Speed dating de la SOCOM.


L’agence – dont je tais le nom ici – fait énormément appel à cette technique qu’elle nomme « médias tactiques ». Ainsi, plusieurs d’entre vous se sont probablement déjà fait « avoir ».

Votre coiffeuse vous parle souvent des avantages du centre de conditionnement physique Curves?

Une inconnue vous complimente sur la robe que vous essayez aux Ailes de la mode?

Des individus dans un bar vantent les mérites d’un centre sportif avec beaucoup d’intérêt?


Il s’agit là de méthode fréquemment utilisée par l’agence de Québec. Personnellement, j’ai beaucoup de difficulté à accepter ce genre de publicité. Je considère qu’il y a une limite à s’infiltrer dans la vie des gens à leur insu. J’adore la publicité, j’en mange, mais cette technique de médias tactiques m’horripile au plus haut point. Quand votre coiffeuse vous fait des confidences, c’est parce qu’elle aime partager ses intérêts, pas parce qu’elle reçoit un chèque pour chaque nouvelle inscription au centre du client de l’agence. Ça pue la malhonnêteté – et, à la limite, le mensonge – à plein nez. Selon moi, c’est carrément INACCEPTABLE.

L’utilisation du bouche-à-oreille ne semblait pas poser de problème éthique au publicitaire de l’agence. En fait, il en était très fier.


Et vous, trouvez-vous acceptable le fais que quelqu’un que vous croyez sincère et sympathique vous approche à de simples fins de publicités?


Sources :

Standley, Jane. BBC News. 2001. « Undercover advertising targets consumers ». En ligne. < http://news.bbc.co.uk/2/hi/business/1496213.stm >. Consulté le 10 novembre 2010.

Vandercammen, Marc et Brigitte Bouton. 2006. Marketing : l'essentiel pour comprendre, décider, agir. Bruxelles : De Boeck, 555 p.

3 commentaires:

Marie-Eve Fortin a dit…

Je crois que cette forme de marketing n'est pas aussi inacceptable qu'il le semble, c'est en fait, un moyen très ingénieux de faire parler de soi. De toute façon, la coiffeuse doit épuiser ses sujets à la longue! Et de toute façon, on parle de tout et n'importe quoi, cette approche donne seulement quelques piste de discussion! Bravo à cette ingénieuse forme de marketing!

Sandrine Charron a dit…

Je ne trouve pas cela plus malhonnête qu'une entreprise qui utilise des clients mystères pour tester les aptitudes de ses employés. Nous sommes rendus à l'ère de l'anonymat, que l'on le veuille ou non..

Il m'est déjà arrivé de dire à une inconnue dans une pharmacie que je préfèrais tel shampooing au lieu de tel, lorsque je la voyais hésiter avec deux marques dans ses mains. Je lui ai vanté les avantages de celui que je préfèrais, et pourtant je ne suis pas payée par la compagnie. La personne qui vient me dire que tel revitalisant est meilleur, la seule différence avec moi c'est qu'elle est payée. Reste qu'elle ne peut pas m'obliger à acheter, et que dépenser ou pas pour la marque qu'elle me vante, c'est mon choix..

Selon moi, ce n'est pas vraiment différent des entreprises qui paient les bloggeurs (ou leur envoient des échantillons gratuits) pour qu'ils vantent leurs produits en bien.. Combien sommes - nous à aller faire une recherche sur le net avant d'acheter un produit et un service ?

Désirée Larocque a dit…

Ouf! Débat éthique!
Très d'accord pour dire que nous avons chacun et chacune le libre arbitre de nos choix. Personne ne nous oblige à aller à un centre d'entraînement quand il nous le suggère.

CEPENDANT, un nuance semble ne pas avoir été retenue dans les commentaires quant à la publication sur le blogue: les coiffeuses n'avaient pas essayé le gym, elles le proposaient parce qu'elles étaient payées. Lorsque vous conseillez quelqu'un qui hésite, vous avez d'abord ressenti l'hésitation de la personne, vous souhaitez donc l'aider au meilleur de vos capacités, selon vos expériences (!). Vous ne faites pas de la pub, c'est pourquoi la personne vous accorde une crédibilité supplémentaire: vous êtes une étudiante, au même titre qu'elle peut l'être.

Le hic, c'est que si vous êtes payé, ce n'est plus le rôle de «personne» que vous occupez, mais bien celui de support publicitaire. Et ce qui accompagne ce problème, c'est que la personne vous accordera une crédibilité qui peut alors être remise en question, en raison du parti-prix que vous aurez pris pour la compagnie vous ayant payé.

Dites mois: s'il n'y avait aucun (et je ne dis bien aucun) problème à cette stratégie tactique, il n'y aurait donc aucun problème pour que la personne soit identifiée en tant que support publicitaire...bien que cela annule la stratégie? Pourtant, les publireportages dans les journaux doivent obligatoirement être identifiés comme tels, n'est-ce pas?

Et effectivement (en réponse au commentaire de Sandrine), de plus en plus de gens le font. Oui, certains blogueurs sont payés pour parler en bien de produits. Ne voyez-vous pas une fois de plus l'arnaque? Vous qui ferez une recherche sur le net pour savoir quel serait le meilleur lecteur DVD à acheter, et qu'un quidam vous dise «achetez X marque, c'est le paradis». Vous l'achetez et finalement il n'est aucunement fonctionnel...ce n'est pas une déception de voir que la personne avait été parfaitement malhonnête? Cela détruit malheureusement la notion de confiance (et de respect, à mon avis).

Bref, conseiller parce qu'on a été payé sans avoir réellement testé le produit est pratiquement du mensonge. Si on présentait le marketing tactique sous cet oeil, combien féliciteraient cette forme de marketing?