Le meurtrier du Métropolis, Richard Bain, a encore fait
parler de lui. L’auteur de la tuerie du 4 septembre dernier s’est exprimé sur
les ondes d’une radio anglophone concernant ses idées politiques. On se
rappellera que Bain a été arrêté pour une tentative de carnage au rassemblement
du Parti Québécois à la suite de la victoire électorale de Pauline Marois comme
nouvelle Première Ministre du Québec. Lors de son arrestation, il s’écriait «les
anglais se réveillent». Le problème est que Bain n’a pas encore comparu en
justice et la station de radio CJAD se permet de diffuser les propos du
meurtrier concernant la situation politique au Québec. La chaine de radio
aurait-t-elle dû propager les propos du criminel ? Voici une question éthique
intéressante.
Pour bien saisir l’ampleur de cette envolée médiatique, on
doit faire référence à la Charte canadienne des droits et libertés.
Cette charte encadre, entre autre, les relations de presse, autant des médias
vers les citoyens que l’inverse. Cependant, cette charte est-t-elle trop
permissible ? La liberté de presse ainsi
que le droit à l’information semblent rendre les médias trop gourmands et
toujours assoiffés d’informations fraîches. Certes, les caractéristiques
mentionnées ci-haut sont des conditions préalables à la vie en société : «
… dans une société démocratique comme le Canada, les gens doivent être libres
de discuter de questions liées aux politiques publiques, de critiquer les
gouvernements et de présenter leurs propres solutions aux problèmes sociaux »
(Gouvernement du Canada, 2012). Bien, mais où sont les limites à ses libertés
d’expression ?
Pour ma part, je crois que c’est une vaste blague. La
station de radio n’aurait jamais dû diffuser les propos de Bain. Sous quel droit
peut-on accepter la propagation des pensées d’un criminel raciste qui n’a même
pas été jugé ? Bain a également causé des dommages physiques à deux personnes.
De fortes rumeurs disaient qu’il aurait commis un véritable carnage si son
fusil ne s’était pas enrayé au moment de passer à l’acte. Pas seulement à cause
de ses propos idéologiques questionnables, mais le fait qu’une personne aie
perdue la vie devrait être une raison suffisante pour empêcher la station de radio
de diffuser l’entrevue.
De plus, Bain n’a même pas été jugé encore. On ne sait même
pas s’il est psychologiquement apte à subir un procès. Alors pourquoi donc
pourrait-il s’exprimer sur la place publique ? Cette histoire me fait penser au
célèbre Charles Manson qui a commis une série de meurtre dans les années 60. Aujourd’hui
âgé de 78 ans, Manson a, tout au long de sa vie, été interpellé à plusieurs
reprises par les médias sur des questions spécifiques. Mais tout le monde sait
que Manson est fou et qu’il ne sortira jamais de prison (même s’il ne cesse de
le demander). Heureusement, lors de son arrestation, on ne lui a pas demandé de
s’exprimer sur les raisons qui ont motivé ses actes et ainsi propager au grand
public ses idées controversées. Pourquoi ce serait différent pour Bain ?
En tant que citoyens éclairés, je crois que nous devons
faire la part des choses. Il est important de ne pas « gober » tout ce que les
médias exposent et qu’il est important de se faire sa propre réalité : «
Décidez des critères que vous retiendrez; définissez-les le mieux possible;
construisez votre grille de lecture; appliquez-la » (Baillargeon, 2005; 302).
BAILLARGEON, Normand.
2006. «Petit cours d’autodéfense intellectuel». LUX. 329 p.
Gouvernement du Canada.
2012. «Liberté d’expression» En ligne. URL : http://www.pch.gc.ca/pgm/pdp-hrp/canada/fre-fra.cfm. Consulté le 20 septembre 2012.
1 commentaire:
Je suis d’accord avec toi qu’au final, l’entrevue n’aurait jamais dû être diffusée étant donné que Richard Bain n’a toujours pas eu son procès. Le fait est que plusieurs personnes ont accepté cette décision concernant l’entrevue, soient premièrement les animateurs qui l’ont questionné et deuxièmement les dirigeants de la radio qui ont accepté que leurs animateurs fassent l’entrevue et qui l’ont ensuite diffusé sur leurs ondes. De mon point de vue, les animateurs ont du faire un choix éthique en se demandant si cette entrevue était bonne ou mauvaise selon leur système de valeur, mais il faut croire que finalement ils n’ont pas pris la bonne décision par rapport aux valeurs de la société. Peut-être est-ce qu’ils ont été forcés ou ils ont tout simplement décidé d’aller à l’encontre de leurs valeurs pour obtenir une entrevue exclusive qui ferait parler d’eux. De l’autre côté, les dirigeants de la radio ont probablement vu qu’en diffusant cette entrevue, ils feraient parler de leur radio et que cela leur permettrait d’augmenter leurs cotes d’écoute. Chacun a donc vu un bénéfice grâce à cette entrevue, mais tous deux n’ont pas analysé le côté éthique de leurs actes. Pourquoi est-ce qu’on donnerait plus de visibilité au présumé meurtrier pour qu’il fasse valoir ses idées, au lieu d’en donner aux familles des victimes pour qu’ils montrent leur désarroi? La raison est simple, je crois que cette entrevue a été faite dans le seul but de faire parler et donc de se faire connaître, et ce, sans penser aux conséquences que cela pourrait engendrer.
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