mercredi 11 avril 2012

Masturbation au travail


En février 2012, dans son bureau de l'hôtel de ville de Témiscouata-sur-le-Lac, secteur Cabano, au Bas-Saint-Laurent, un homme a été surpris en train de se masturber devant un film pornographique. Cet homme, Pierre Bélanger, avait été engagé en 2011 pour diriger la Corporation Avantages Témiscouata, qui vise essentiellement le développement économique et touristique de la municipalité régionale de comté (MRC). Le maire de l’endroit, Gilles Garon, a étouffé l’affaire, qui a cependant rebondi à la séance du conseil municipal du 2 avril. Il a à ce moment diminué la portée du geste. Les conseillers municipaux, qui venaient tout juste d'apprendre les faits, ont accusé le maire d’avoir protégé M. Bélanger. Aucune accusation n’a été déposée contre M. Bélanger, qui a par ailleurs remis sa démission.

L’affaire fait beaucoup de bruit au Témiscouata, petite MRC qui compte environ 22 000 habitants. Le secteur de Cabano compte un peu plus de 3000 habitants. On comprend donc qu’une affaire de ce genre soulève les passions dans un petit milieu. Les médias locaux, dont l’hebdomadaire Info-Dimanche et la station de radio Horizon FM, ont rapporté les différents événements liés à l’affaire.

Le Journal de Québec et Le Soleil en ont également parlé, le premier pour relater les faits et le deuxième pour publier un article issu d’une discussion avec M. Bélanger, qui, essentiellement, demande qu’on arrête de le stigmatiser. « Pierre Bélanger ne veut qu'une chose : reprendre une vie normale. "Je veux qu'on nous laisse vivre en paix moi et ma famille. J'ai commis un geste malheureux, je le regrette et j'en assume l'entière responsabilité. Mais c'est assez. J'ai tué personne et je n'ai pas l'intention de me cacher." » (Larouche, 2012 : en ligne)

Ici, je vois principalement deux enjeux éthiques. D’abord, se masturber au travail est loin d’être éthique. La crédibilité et la réputation de l’homme, auparavant très respecté dans la région, sont réellement entachées. On peut également se poser des questions sur son jugement et ses valeurs personnelles. Il devra par ailleurs vraisemblablement quitter la région pour se trouver un autre emploi.

L’autre enjeu éthique que je perçois est la réaction et la décision du maire, M. Garon. Étouffer l’affaire et ne pas réclamer la démission de M. Bélanger ne sont pas des comportements éthiques. Certes, comme le dit M. Bélanger lui-même, il n’a pas commis de crime et il n’a pas été condamné à quoi que ce soit. Toutefois, le lien de confiance est brisé. Pourquoi le maire a-t-il camouflé l’événement ? Ce n’est certainement pas faire preuve de transparence, ni d’éthique. M. Bélanger ne relève pas du code d’éthique et de déontologie désormais obligatoire dans les municipalités, à la suite d’une décision de l’Union des municipalités du Québec. Le maire, lui, l’est pourtant. Malheureusement, il n’a apparemment pas retenu grand-chose de la formation obligatoire et de l’adoption de ce code à la ville de Témiscouata-sur-le-Lac.




Hardy, Dominique. 2012. « Controverse à Témiscouata – Le dg d’une corporation démissionne ». In Journal de Québec. En ligne. 5 avril. http://www.journaldequebec.com/2012/04/05/le-dg-dune-corporation-demissionne. Consulté le 11 avril 2012.

Info-Dimanche. 2012. « Démission à la Corporation Avantages Témiscouata ». In Infodimanche.com. En ligne. 4 avril. http://www.infodimanche.com/index.asp?s=detail_actualite&id=145482. Consulté le 11 avril 2012.

Larouche, Marc. 2012. « Un homme surpris à se masturber au bureau en a assez du procès public ». In Cyberpresse. En ligne. 11 avril. http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/justice-et-faits-divers/201204/10/01-4514049-un-homme-surpris-a-se-masturber-au-bureau-en-a-assez-du-proces-public.php. Consulté le 11 avril 2012.

MRC de Témiscouata. 2011. « Témiscouata-sur-le-Lac ». In MRC de Témiscouata. En ligne. http://mrctemiscouata.qc.ca/temiscouata-sur-le-lac. Consulté le 11 avril 2012.

 Union des municipalités du Québec. 2011. « Éthique et déontologie ». In Grands dossiers. En ligne. http://www.umq.qc.ca/fr/grands-dossiers/ethique-et-deontologie/. Consulté le 11 avril 2012.

1 commentaire:

Anthony Melanson, Benoît Archer et Andréanne Plante a dit…

Une question éthique semblable a fait les manchettes dernièrement. C’est un peu moins sensationnaliste, mais également au municipal. C’était à propos d’Yvon Bussières, conseiller indépendant, qui aurait engagé sa femme, comme secrétaire et conseillère, pendant trois ans. Le maire Labeaume a remis en doute l’éthique du M. Bussières devant des journalistes : «Ce monsieur-là a toujours le mot éthique sur le bord des lèvres. Il est toujours en train de faire des leçons d'éthique, et c'est le premier à avoir un comportement pour le moins discutable sur le plan de l'éthique.» Pourtant, il se disait surpris d’apprendre cette nouvelle. Anne Guérette, une conseillère indépendante, a fortement souligné qu’elle croit plutôt que « le maire Labeaume savait précisément que M. Bussières embauchait sa femme ». Qui alors n’a pas suivi l’éthique dans l’exercice de ses fonctions?

Au niveau juridique, il n’y a peut-être pas à s’inquiéter puisque Mme Bussières aurait cessé d’être rémunérée par les fonds publics lorsque le Règlement sur l’éthique et la déontologie régissant les membres du conseil a été adopté. M. Bussières était donc dans son droit d’engager sa femme avant l’adoption de ce règlement. Voici ce que stipule ce règlement : « Un membre du conseil ne doit pas se placer sciemment dans une situation susceptible de mettre en conflit, d’une part, son intérêt personnel et, d’autre part, les devoirs de sa fonction. La participation d’un membre du conseil à l’embauche d’un membre de sa famille ou d’un conjoint pour un emploi à la ville ou pour un emploi rémunéré à l’aide de sommes versées par la ville est visée notamment par le premier alinéa.» (Ville de Québec, 2011 : 2) Est-ce que cela rend le tout plus éthique? Pas nécessairement puisqu’avec ou sans règlement, on pouvait se poser la question s’il n’était pas justement cas de conflits d’intérêts. D’autre part, il ne serait pas plus éthique que M. Labeaume ait menti aux journalistes en disant qu’il n’était pas au courant. De plus, il aurait menti pour se protéger face au règlement, mais celui-ci n’était pas encore en vigueur lors du méfait, qui n’en est donc pas un.

On peut donc constater de toute cette question éthique est basée sur un méfait qui n’en est pas un vis-à-vis du récent règlement. Une situation étrange. Est-ce que les journalistes ont sorti un sujet qui n’avait pas lieu d’être ou est-ce que cela nous a permis de réaliser la présence de problématiques éthiques entourant les conseillers municipaux?


Gaudreau, Valérie. 11 avril 2012. « Deux indépendants défendent le conseiller Yvon Bussières ». Le Soleil, En ligne. http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/la-capitale/201204/10/01-4514055-deux-independants-defendent-le-conseiller-yvon-bussieres.php Consulté le 11 avril 2012.

Radio-Canada (nom du journaliste non disponible). 10 avril 2012. « Déontologie: Yvon Bussières a embauché sa femme avec des fonds publics ». Radio-Canada. En ligne. http://www.radio-canada.ca/regions/Quebec/2012/04/10/001-bussieres-femme-femme.shtml Consulté le 11 avril 2012.

Ville de Québec. Novembre 2011. « Règlement sur l’éthique et la déontologie régissant les membres du conseil ». Règlement R.V.Q. 1854. En ligne. http://www.ville.quebec.qc.ca/apropos/vie_democratique/doc/ethique_screen.pdf Consulté le 11 avril 2012. 4 pages.