Les
journalistes ont comme devoir professionnel d’informer les citoyens sur des sujets
d’actualités. Ils doivent faire preuve d’objectivité et de neutralité en tout
temps. Une profession qui semble au premier abord noble et juste. Toutefois, les
journalistes doivent désormais faire face à des contraintes économiques et des
contraintes de temps.
Pour
augmenter leur chiffre d’affaires, les entreprises médiatiques doivent s’assurer
d’avoir des lecteurs, des auditeurs et des téléspectateurs. Plus le public est
large, plus la recette publicitaire est importante et plus il y a de profits.
D’où la nécessité pour ces entreprises d’attirer l’attention et de répondre aux
besoins de leurs publics. Mais, cette tâche revient en réalité aux
journalistes. D’une part, ils doivent informer les citoyens sur les enjeux
sociaux, économiques et politiques et du même coup, ils doivent s’assurer que
l’information transmise attirera l’attention de ceux-ci. Les journalistes
doivent désormais informer pour être lu, écouter ou regarder et non plus
informer au nom de la démocratie. Selon le chercheur Glassner les médias n’auraient plus ce désir d’informer
de manière ‘rigoureuse et équilibrée’ mais ils chercheraient plutôt à faire du
profit (1999).
Il y a aussi une contrainte de temps qui vient perturber le travail des
journalistes. Pour surprendre le public, il faut que les nouvelles soient
fraiches. Il y a ainsi une grande concurrence entre les différents médias pour
être le premier à annoncer un « scoop ». La variable de temps devient
essentielle pour faire compétition. Ce temps limité à des répercussions
considérables dans le travail des journalistes. Ils sont davantage portés à
anticiper les conséquences des événements plutôt qu’à expliquer et analyser une
situation.
En général, ce
qui attire l’attention ce sont des faits divers, des histoires alarmantes, des
scandales, des crimes, des témoignages humains et des catastrophes naturelles.
Les enjeux plus complexes sur la politique, l’économie ou les découvertes
scientifiques sont des sujets moins en vogue. Le sensationnalisme médiatique vient remédier à la
situation. Comme le déplore Marc-François Bernier, pour remédier à ces diverses
contraintes de temps et d’argent, « la stratégie la
plus rentable demeure la superficialité, la simplification parfois abusive,
l’exagération de certains faits ou d’hypothétiques conséquences sociales,
économiques, morales, scientifiques, etc. » (2003) En conséquence, les
journalistes doivent se repositionner professionnellement pour répondre à la
demande. Lors du congrès de l’association francophone pour le savoir [ACFAS] en
2003, Marc-François Bernier décrit le sensationnalisme médiatique comme une
« Amplification temporaire de cette tendance naturelle des
journalistes à privilégier le côté négatif des événements. Pendant les épisodes
de sensationnalisme, pour répondre rapidement à une demande d’information de la
part du public, les journalistes gardent essentiellement la même posture mais
multiplient les articles ou les reportages alarmistes sur un sujet particulier. »
Il n’est pas nouveau que les nouvelles soient bondées d’histoires et
d’images cauchemardesques, de guerres, de sang, de souffrances, de sagas
politiques, etc. Toujours plus
sombre, toujours plus violent, toujours plus choquant. Jusqu’où iront-ils ces
journalistes pour surprendre? Est-ce que le public deviendrait de moins en
moins sensible devant ces multiples scènes de drames? La limite de l’acceptable
est entre les mains du photojournaliste. Pour l’instant, ces professionnels
sont tenus de respecter la dignité et la vie privée des personnes. Mais lorsque
le public en demandera plus, est-ce que les journalistes franchiront la zone
grise pour répondre à la demande? Est-ce vraiment l’argent qui contrôle notre monde?
Bernier,
Marc-François. 2003. « Le sensationnalisme en journalisme : excès de la
demande sur l’offre? ». Communication dans le cadre du congrès de l’ACFAS,
Rimouski. [en ligne]. http://metamedias.blogspot.com/2003/05/le-sensationnalisme-en-journalisme.html. Consulté le 16 mars 2012
GLASSNER, Barry. The Culture of
Fear: Why Americans are Afraid of the Wrong Things, New York, Basic Books,
1999, 276 p.
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